La règle maçonnique approuvée au convent de Wilhemsbad
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La règle maçonnique approuvée au convent de Wilhemsbad

2 juillet 2013

La règle maçonnique approuvée au convent de Wilhemsbad

"Chaque société a besoin, pour se maintenir et se développer, de se soumettre à des règles. Certaines règles, telles que les constitutions des états  ou les règlements intérieurs des associations définissent l'organisation interne ou encore les procédures de résolutions de litige par exemple. D'autres règles sont plutôt des "règles de vie" indiquant aux membres comment agir dans certaines circonstances ou face à certaines problématiques, des plus théoriques au plus pratiques.


Parmi les exemples les plus arquant de "règles", on pense d'abord aux règles monastiques apparues en Orient avec les règles de saint Pacôme (+ 346) ou celle de saint Basile (+ 379). Elles furent consolidées, en Occident, à Lérins, par saint Honorat (+ 430) et un peu plus tard par saint Benoît de Nursie (+547). Les règles des ordres monastiques toujours vivants en Occident en sont issues.


Qu'en est-il de la Franc-maçonnerie qui n'est ni ordre monastique ni ordre chevaleresque au sens strict du terme ? En tant que société organisée, la Franc-maçonnerie s'est très tôt dotée de règlements : ce furent les fameuses "Constitution d'Anderson" écrites et traduites dans les années 1720 - 1730. Le Régime rectifié a cela de particulier qu'il chercha à mener une "rectification" de la Franc-maçonnerie en plein XVIIIe siècle. L'une des étapes fondamentales de cette rectification fut le convent national des Gaules tenue à Lyon en 1778 et une  Règle y fut rédigée. Elle fut légèrement modifiée en 1782 à Wilhelmsbad lors du convent générale de l'Ordre.


Cette Règle Maçonnique est  en réalité spécifique à la maçonnerie rectifiée. Elle est encore de nos jours remise à l'apprenti le soir même de sa réception. Il est donc censé s'y astreindre s'il veut respecter son engagement et mener à bien son cheminement initiatique.

Le Recès du Convent de Wilhelmsbad (Cahiers verts, Hors série "Les convents", 2005, p. 125) l'évoque comme suit :

"Malgré que nos Loges se soient toujours empressées d’enseigner à leurs membres les préceptes de la morale la plus pure et de graver surtout dans le coeur des nouveaux reçus les leçons de la sagesse et de la vertu : nous avons cru devoir faire composer une règle générale pour tous les Maçons, qui leur traçât avec énergie ce qu’ils doivent à Dieu, à leur prochain, à eux mêmes, à leurs frères et à l’Ordre en général ; nous avons par conséquent adopté une règle, écrite dans les deux langues, pour être lue au Candidat lors de son initiation, et avons donné pareillement notre sanction à une paraphrase de cette même règle contenue en neuf articles, pour être soumise à sa méditation ultérieure et être lue quelquefois l’année dans nos Loges."


On voit ainsi l'importance de ce texte parfois mis de côté, peut être en raison de la rigueur de ses exigences. Nous avons opté pour sa publication : on la trouve déjà ailleurs sur le web et depuis des décennies dans les livres disponibles partout, de plus elle n'est pas particulièrement divulgatrice de secrets maçonniques. Sa lecture permettra au maçon de mieux comprendre l'essence du Régime rectifié et au non maçon de m ieux comprendre ce en quoi il s'engagerait s'il souhaitait rejoindre l'Ordre.


Cette Règle est une composante structurante du fond rituélique et doctrinale qui constitue le Régime écossais rectifié au sein du GPDG :


LA RÈGLE MAÇONNIQUE

La Règle maçonnique approuvée lors du Convent de Wilhelmsbad (1782)

O toi qui viens d’être initié aux leçons de la sagesse ! fils de la vertu et de l’amitié ! prête à nos accents une oreille attentive et que ton âme s’ouvre aux préceptes mâles de la vérité ! nous t’enseignerons le chemin qui mène à la vie heureuse ; nous t’apprendrons à plaire à ton Auteur et à développer, avec énergie et succès, tous les moyens que la Providence te confia pour te rendre utile aux hommes et goûter les charmes de la bienfaisance.

ARTICLE I. DEVOIRS ENVERS DIEU ET LA RELIGION

I Ton premier hommage appartient à la Divinité. Adore l’Être plein de majesté qui créa l’univers par un acte de sa volonté, qui le conserve par un effet de son action continue, qui remplit ton cœur, mais que ton esprit borné ne peut concevoir, ni définir. Plains le triste délire de celui qui ferme ses yeux à la lumière et se promène dans les ténèbres épaisses du hasard : que ton cœur attendri et reconnaissant des bienfaits paternels de ton Dieu, rejette avec mépris ces vains sophismes, qui prouvent la dégradation de l’esprit humain lorsqu’il s’éloigne de sa source. Élève souvent ton âme au-dessus des êtres matériels qui t’environnent, et jette un regard plein de désir dans les régions supérieures qui sont ton héritage et ta vraie patrie. Fais à ce Dieu le sacrifice de ta volonté et de tes désirs, rends-toi digne de ses influences vivifiantes, remplis les lois qu’il voulut que tu accomplisses comme homme dans ta carrière terrestre. Plaire à ton Dieu, voilà ton bonheur ; être réuni à jamais à Lui, voilà toute ton ambition, la boussole de tes actions.

II Mais comment oserais-tu soutenir ses regards, être fragile qui transgresses à chaque instant ses lois et offenses sa sainteté, si sa bonté paternelle ne t’eût ménagé un Réparateur infini ? Abandonné aux égarements de ta raison, où trouverais-tu la certitude d’un avenir consolant ? Livré à la Justice de ton Dieu, où serait ton refuge ? Rends donc grâce à ton Rédempteur ; prosterne-toi devant le Verbe incarné, et bénis la Providence qui te fit naître parmi les chrétiens. Professe en tous lieux la divine Religion du Christ, et ne rougis jamais de lui appartenir. L’Évangile est la base de nos obligations ; si tu n’y croyais pas, tu cesserais d’être Maçon. Annonce dans toutes tes actions une piété éclairée et active, sans hypocrisie, sans fanatisme ; le Christianisme ne se borne pas à des vérités de spéculation ; pratique tous les devoirs moraux qu’il enseigne, et tu seras heureux ; tes contemporains te béniront et tu paraîtras sans trouble devant le trône de l’Éternel.

III Surtout pénètre-toi de ce principe de charité et d’amour, base de cette sainte Religion ; plains l’erreur sans la haïr et sans la persécuter ; laisse à Dieu seul le soin de juger, et contente-toi d’aimer et de tolérer. Maçons ! Enfants d’un même Dieu ! réunis par une croyance commune en notre divin Sauveur ! que ce lien d’amour nous unisse étroitement et fasse disparaître tout préjugé contraire à notre concorde fraternelle.

ARTICLE II. IMMORTALITÉ DE L’ÂME

I Homme ! Roi du monde ! Chef-d’œuvre de la création lorsque Dieu l’anima de son souffle ! médite ta sublime destination. Tout ce qui végète autour de toi, et n’a qu’une vie animale, périt avec le temps, et est soumis à son empire : ton âme immortelle seule, émanée du sein de la Divinité, survit aux choses matérielles et ne périra point. Voilà ton vrai titre de noblesse ; sens vivement ton bonheur, mais sans orgueil : il perdit ta race et te replongerait dans l’abîme. Etre dégradé ! malgré ta grandeur primitive et relative, qu’es-tu devant l’Éternel ? Adore-le dans la poussière et sépare avec soin ce principe céleste et indestructible des alliages étrangers ; cultive ton âme immortelle et perfectible, et rends-la susceptible d’être réunie à la source pure du bien, lorsqu’elle sera dégagée des vapeurs grossières de la matière. C’est ainsi que tu seras libre au milieu des fers, heureux au sein même du malheur, inébranlable au plus fort des orages et que tu mourras sans frayeur.

II Maçon ! si jamais tu pouvais douter de la nature immortelle de ton âme, et de ta haute destination, l’initiation serait sans fruit pour toi ; tu cesserais d’être le fils adoptif de la sagesse, et tu serais confondu dans la foule des êtres matériels et profanes, qui tâtonnent dans les ténèbres.

ARTICLE III. DEVOIRS ENVERS LE SOUVERAIN ET LA PATRIE

I L’Être suprême confia d’une manière plus positive ses pouvoirs sur la terre au Souverain ; respecte et chéris son autorité légitime sur le coin de la terre que tu habites ; ton premier hommage appartient à Dieu ; le second à ta Patrie. L’homme errant dans les bois, sans culture et fuyant ses semblables, serait peu propre à remplir les vues de la Providence et à saisir toute la masse du bonheur qui lui est réservé. Son être s’agrandit au milieu de ses semblables ; son esprit se fortifie par le choc des opinions ; mais une fois réuni en société, il aurait à combattre sans cesse l’intérêt personnel et les passions désordonnées, et l’innocence bientôt succomberait sous la force ou sous la ruse. Il fallut donc des lois pour le guider et des chefs pour les maintenir.

II Homme sensible ! tu révères tes parents ; honore de même les pères de l'État et prie pour leur conservation ; ils sont les représentants de la Divinité sur cette terre. S’ils s’égarent, ils en répondront au Juge des Rois ; mais ton propre sentiment peut te tromper, et jamais te dispenser d’obéir. Si tu manquais à ce devoir sacré, si ton cœur ne tressaillait plus au doux nom de Patrie et de ton Souverain, le Maçon te repousserait de son sein comme réfractaire à l’ordre public, comme indigne de participer aux avantages d’une association qui mérite la confiance et l’estime des gouvernements, puisqu’un de ses principaux mobiles est le patriotisme et que, jalouse de former les meilleurs citoyens, elle exige que ses enfants remplissent, avec le plus de distinction et par les motifs les plus épurés, tous les devoirs de leur état civil. Le guerrier le plus courageux, le juge le plus intègre, le maître le plus doux, le serviteur le plus fidèle, le père le plus tendre, l’époux le plus constant, le fils le plus soumis, doit être le Maçon, puisque les obligations ordinaires et communes du citoyen ont été sanctifiées et renforcées par les vœux libres et volontaires du Maçon, et qu’en les négligeant il joindrait à la faiblesse l’hypocrisie et le parjure.

ARTICLE IV. DEVOIRS ENVERS L’HUMANITÉ EN GÉNÉRAL

I Mais si le cercle patriotique qui t’ouvre une carrière si féconde et si satisfaisante, ne remplit pas encore toute ton activité, si ton cœur sensible veut franchir les bornes des empires et embraser avec ce feu électrique de l’humanité, tous les hommes, toutes les nations ; si, remontant à la source commune, tu te plais à chérir tendrement tous ceux qui ont les mêmes organes, le même besoin d’aimer, le même désir d’être utile et une âme immortelle comme toi, viens alors dans nos temples offrir tes hommages à la sainte humanité ; l’univers est la patrie du Maçon, et rien de ce qui regarde l’homme ne lui est étranger. Vois avec respect cet édifice majestueux, destiné à resserrer les liens trop relâchés de la morale ; chéris une association générale d’âmes vertueuses, capables de s’exalter, répandue dans tous les pays où la raison et les lumières ont pénétré, réunie sous la bannière sainte de l’humanité, régie par des lois simples et uniformes. Sens enfin le but sublime de notre Saint Ordre : consacre ton activité et toute ta vie à la bienfaisance ; ennoblis, épure et fortifie cette généreuse résolution, en travaillant sans relâche et ta perfection et te réunissant plus intimement à la Divinité.

ARTICLE V. BIENFAISANCE

I Créé à l’image de Dieu, qui a daigné se communiquer aux hommes et répandre sur eux le bonheur, rapproche-toi de ce modèle infini, par une volonté constante de verser sans cesse sur les autres hommes toute la masse de bonheur qui est en ton pouvoir. Tout ce que l’esprit peut concevoir de bien est le patrimoine du Maçon.

II Vois la misère impuissante de l’enfance, elle réclame ton appui ; considère l’inexpérience funeste de la jeunesse, elle sollicite tes conseils ; mets ta félicité à la préserver des erreurs et des séductions qui la menacent ; excite en elle les étincelles du feu sacré du génie et aide à les développer pour le bonheur du monde.

III Tout être qui souffre ou gémit a des droits sacrés sur toi, garde-toi de les méconnaître : n’attends point que le cri perçant de la misère te sollicite : préviens et rassure l’infortuné timide ; n’empoisonne pas, par l’ostentation de tes dons, les sources d’eau vive où le malheureux doit se désaltérer ; ne cherche pas la récompense de ta bienfaisance dans les vains applaudissements de la multitude ; le Maçon la trouve dans le suffrage tranquille de sa conscience et dans le sourire fortifiant de la Divinité, sous les yeux de laquelle il est sans cesse placé.

IV Si la Providence libérale t’a accordé quelque superflu, garde-toi d’en faire un usage frivole et criminel ; elle voulut que, par un mouvement libre et spontané de ton âme généreuse, tu rendisses moins sensible la distribution inégale des biens, qui entrait dans ses plans ; jouis de cette belle prérogative. Que jamais l’avarice, la plus sordide des passions, n’avilisse ton caractère, et que ton cœur se soulève aux calculs froids et arides qu’elle suggère. Si jamais il venait à se dessécher à son souffle triste et intéressé, fuis nos ateliers de charité, ils seraient sans attrait pour toi, et nous ne pourrions plus reconnaître en toi l’ancienne image de la Divinité.

V Que ta bienfaisance soit éclairée par la religion, la sagesse et la prudence ; ton cœur voudrait embrasser les besoins de l’humanité entière, mais ton esprit doit choisir les plus pressants et les plus importants. Instruis, conseille, protège, donne, soulage tour à tour ; ne crois jamais avoir assez fait, et ne te repose de tes œuvres que pour montrer une nouvelle énergie. En te livrant ainsi aux élans de cette passion sublime, une source intarissable de jouissances s’apprête pour toi : tu auras sur cette terre l’avant-goût de la félicité céleste, ton âme s’agrandira, et tous les instants de ta vie seront remplis. Lorsqu’enfin tu sens les bornes de ta nature finie, et que ne pouvant suffire seul au bien que tu voudrais faire, ton âme s’attriste, viens dans nos temples ; vois le faisceau sacré de bienfaits qui nous unit, et concourant efficacement, selon toutes tes facultés, aux plans et aux établissements utiles que l’association maçonnique te présente et qu’elle réalise, félicite-toi d’être citoyen de ce meilleur monde ; goûte les doux fruits de nos forces combinées et concentrées sur un même objet ; alors tes ressources se multiplieront, tu aideras à faire mille heureux au lieu d’un et tes voeux seront couronnés.

ARTICLE VI. AUTRES DEVOIRS MORAUX ENVERS LES HOMMES

I Aime ton prochain autant que toi-même, et ne lui fais jamais ce que tu ne voudrais pas qu’on te fit. Sers-toi du don sublime de la parole, signe extérieur de ta domination sur la nature, pour aller au-devant des besoins d’autrui, et pour exciter dans tous les cœurs le feu sacré de la vertu. Sois affable et officieux, édifie par ton exemple, partage la félicité d’autrui sans jalousie. Ne permets jamais à l’envie de s’élever un instant dans ton sein, elle troublerait la source pure de ton bonheur, et ton âme serait en proie à la plus triste des furies.

II Pardonne à ton ennemi ; ne t’en venge que par tes bienfaits ; ce sacrifice généreux, dont nous devons le sublime précepte à la religion, te procurera les plaisirs les plus purs et les plus délicieux ; tu redeviendras la vive image de la Divinité, qui pardonne avec une bonté céleste les offenses de l’homme, et le comble de grâces malgré son ingratitude. Rappelle-toi donc toujours que c’est là le triomphe le plus beau que la raison puisse obtenir sur l’instinct, et que le Maçon oublie les injures, mais jamais les bienfaits.

ARTICLE VII. PERFECTION MORALE DE SOI-MÊME

I En te dévouant ainsi au bien d’autrui, n’oublie point ta propre perfection et ne néglige pas de satisfaire les besoins de ton âme immortelle. Descends souvent dans ton cœur, pour en sonder les replis les plus cachés. La connaissance de soi-même est le grand pivot des préceptes maçonniques. Ton âme est la pierre brute qu’il faut dégrossir : offre à la Divinité l’hommage de tes affections réglées, de tes passions vaincues.

II Que des mœurs chastes et sévères soient tes compagnes inséparables, et te rendent respectable aux yeux des profanes ; que ton âme soit pure, droite, vraie et humble. L’orgueil est l’ennemi le plus dangereux de l’homme, il l’entretient dans une confiance illusoire de ses forces. Ne considère point le terme où tu es venu, il ralentirait ta course ; fixe celui où tu dois arriver ; la courte durée de ton passage te laisse à peine l’espoir d’y atteindre. Ôte à ton amour-propre l’aliment dangereux de la comparaison avec ceux qui sont derrière toi ; sens plutôt l’aiguillon d’une émulation vertueuse, en voyant des modèles plus accomplis devant toi.

III Que jamais ta bouche n’altère les pensées secrètes de ton coeur, qu’elle en soit toujours l’organe vrai et fidèle : un Maçon qui se dépouillerait de la candeur, pour prendre le masque de l’hypocrisie et de l’artifice, serait indigne d’habiter avec nous, et, semant la méfiance et la discorde dans nos paisibles temples, il en deviendrait bientôt l’horreur et le fléau.

IV Que l’idée sublime de la toute-présence de Dieu te fortifie, te soutienne ; renouvelle chaque matin le vœu de devenir meilleur : veille et prie. Et lorsque sur le soir ton cœur satisfait te rappelle une bonne action, ou quelque victoire remportée sur toi-même, alors seulement repose tranquillement dans le sein de la Providence et reprends de nouvelles forces.

V Étudie enfin le sens des hiéroglyphes et des emblèmes que l’ordre te présente. La nature même, voile la plupart de ses secrets ; elle veut être observée, comparée et surprise souvent dans ses effets. De toutes les sciences dont le vaste champ présente les résultats les plus heureux à l’industrie de l’homme et à l’avantage de la société, celle qui t’enseignera les rapports entre Dieu, l’univers et toi, comblera les désirs de ton âme céleste, et t’apprendra à mieux remplir tes devoirs.

 ARTICLE VIII. DEVOIRS ENVERS LES FRÈRES

I Dans la foule immense des êtres dont cet univers est peuplé, tu as choisi par un vœu libre les Maçons pour tes Frères. N’oublie donc jamais que tout Maçon, de quelque communion chrétienne, pays ou condition qu’il soit, en te présentant sa main droite, symbole de la franchise fraternelle, a des droits sacrés sur ton assistance et sur ton amitié. Fidèle au vœu de la nature, qui fut l’égalité, le Maçon rétablit dans ses temples les droits originaires de la famille humaine ; il ne sacrifie jamais aux préjugés populaires, et le niveau sacré assimile ici tous les états. Respecte dans la société civile les distances établies ou tolérées par la Providence ; souvent l’orgueil les imagina ; il y en aurait à les fronder, et à vouloir les méconnaître. Mais garde-toi, surtout d’établir parmi nous des distinctions factices que nous désavouons ; laisse tes dignités et tes décorations profanes à la porte, et n’entre qu’avec l’escorte de tes vertus. Quel que soit ton rang dans le monde, cède le pas dans nos Loges au plus vertueux, au plus éclairé.

II Ne rougis jamais en public d’un homme obscur mais honnête, que dans nos asiles, tu embrassas comme Frère quelques instants auparavant ; l’Ordre rougirait de toi à son tour et te renverrait, avec ton orgueil, pour l’étaler sur les théâtres profanes du monde. Si ton Frère est en danger, vole à son secours, et ne crains pas d’exposer pour lui ta vie. S’il est dans le besoin, verse sur lui tes trésors, et réjouis-toi d’en pouvoir faire un emploi aussi satisfaisant ; tu as juré d’exercer la bienfaisance envers les hommes en général, tu la dois de préférence à ton Frère qui gémit. S’il est dans l’erreur et qu’il s’égare, viens à lui avec les lumières du sentiment, de la raison, de la persuasion. Ramène à la vertu des êtres qui chancellent, et relève ceux qui sont tombés.

III Si ton cœur ulcéré par des offenses vraies ou imaginaires, nourrissait quelque inimitié secrète contre un de tes Frères, dissipe à l’instant le nuage qui s’élève ; appelle à ton secours quelque arbitre désintéressé, réclame sa médiation fraternelle ; mais ne passe jamais le seuil du temple avant d’avoir déposé tout sentiment de haine ou de vengeance. Tu invoquerais en vain le nom de l’Éternel, pour qu’il daignât habiter dans nos temples, s’ils ne sont purifiés par les vertus des Frères et sanctifiés par leur concorde.

 ARTICLE IX. DEVOIRS ENVERS L’ORDRE

I Lorsqu’enfin tu fus admis à la participation des avantages qui résultent de l’association maçonnique, tu lui abandonnas en échange, tacitement, une partie de ta liberté naturelle ; accomplis donc strictement les obligations morales qu’elle t’impose ; conforme-toi à ses sages règlements et respecte ceux que la confiance publique a désignés pour être les gardiens des lois et les interprètes du vœu général. Ta volonté dans l’Ordre est soumise à celle de la loi et des supérieurs : tu serais un mauvais frère si tu méconnaissais jamais cette subordination nécessaire dans toute société, et la nôtre serait forcée de t’exclure de son sein.

II Il est surtout une loi dont tu as promis, à la face des cieux, la scrupuleuse observance : c’est celle du secret le plus inviolable sur nos rituels, cérémonies, signes et la forme de notre association. Garde-toi de croire que cet engagement est moins sacré que les serments que tu juras dans la société civile. Tu fus libre en le prononçant, mais tu ne l’es plus de rompre le secret qui te lie. L’Éternel, que tu invoquas comme témoin, l’a ratifié : crains les peines attachées au parjure : tu n’échapperais jamais au supplice de ton cœur, et tu perdrais l’estime et la confiance d’une société nombreuse, qui aurait droit de te déclarer sans foi et sans honneur. Si les leçons que l’Ordre t’adresse, pour te faciliter le chemin de la vérité et du bonheur, se gravent profondément dans ton âme docile et ouverte aux impressions de la vertu ; si les maximes salutaires, qui marqueront pour ainsi dire chaque pas que tu feras dans la carrière maçonnique, deviennent tes propres principes et la règle invariable de tes actions ; ô mon Frère, quelle sera notre joie ! tu accompliras ta sublime destinée, tu recouvreras cette ressemblance divine, qui fut le partage de l’homme dans son état d’innocence, qui est le but du Christianisme, et dont l’initiation maçonnique fait son objet principal. Tu redeviendras la créature chérie du Ciel : ses bénédictions fécondes s’arrêteront sur toi ; et méritant le titre glorieux de sage, toujours libre, heureux et constant, tu marcheras sur cette terre l’égal des rois, le bienfaiteur des hommes, et le modèle de tes Frères. "



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